AXE 3 : Tensions politiques et culturelles
Dans le cadre général de l’étude des « Rapports de force » qui constitue la problématique d’ensemble de l’équipe HCTI pour la période 2012-2015, ce troisième axe se propose d’analyser la notion de « tension » d’ordre politique ou culturel. L’analyse de cette notion, que ne recouvre pas totalement celle de conflit, suppose une prise en compte de rapports dynamiques et de rééquilibrages perpétuels entre différentes « forces », qu’il s’agisse de modèles politiques, idéologiques, ou culturels. Les questions concernant les influences réciproques, les héritages historiques et culturels admis ou récusés, les déplacements axiologiques liés aux changements de modèles dominants et de systèmes de pensée seront évidemment au cœur des réflexions portées par cet axe. Les cinq sous-axes développés plus loin se situent tous dans cette perspective de mise en évidence des affrontements, conflits, domination ou simplement atteinte d’un point d’équilibre entre différentes forces.
Dans le domaine politique, les questions liées au pouvoir s’avèrent évidemment essentielles, qu’il s’agisse de réfléchir aux tensions nées du couple révolution/contre-révolution, ou de s’interroger sur l’image du chef et sur la représentation du pouvoir.
Inévitablement, la réflexion sur la représentation culturelle ou littéraire de la Révolution (sous-axe « Révolution et contre-révolution ») fait surgir des prises de positions politiques potentiellement conflictuelles. De plus, la notion même de révolution comporte intrinsèquement celle de conflit, de mise en tension de l’avant et de l’après, et fait surgir des images de rupture, de « table rase », d’abîme séparant deux époques. Au-delà de ces « tensions » évidentes, le travail sur les notions consistera également en une mise en tension de diverses représentations : tensions idéologiques, disciplinaires (comment, par exemple, l’histoire et la littérature pensent-elles différemment le pouvoir, le régime politique.. ?).
Le sous-axe, « Les représentations du chef », articule également sa réflexion autour des notions de changement et d’opposition entre différents modèles, modèles hérités du passé et nouvelles représentations de l’autorité en train de se constituer. La perspective diachronique adoptée place en effet au cœur de la démarche de recherche la volonté de faire émerger les modalités de construction de l’image du chef, à la confluence de diverses influences parfois contradictoires et, pour la modernité, de crise de confiance dans les modèles de pouvoir laissés en héritage. Ces tensions, culturelles cette fois, sont l’objet des trois autres sous-axes : « Intertextualité et imaginaire biblique », et « Les Amériques entre l’ancien et le nouveau » et « La sociabilité à l’épreuve des rapports de force, au Siècle des Lumières, en Grande-Bretagne et en France ».
Le premier examine les rapports dynamiques entre les écritures dites « saintes » (notamment Bible juive et Bible chrétienne) et tout autre type de texte (littéraire, philosophique, politique, etc.), censé avoir un statut essentiellement différent (sécularisé, profane, etc.) desdites écritures. Il s’agit donc de décliner et d’interroger les oppositions concernant le statut du texte (sacré/ profane), sa réécriture (imitation, pastiche, parodie…), tout comme le rapport entretenu par le texte biblique à l’égard d’autres fondements culturels comme l’Antiquité gréco-latine. Plus largement, la question des influences bibliques sur la littérature induit des interprétations religieuses, culturelles, politiques divergentes et porteuses d’enjeux qui dépassent le cadre strict de la littérature.
Le second sous-axe culturel s’intéresse au rapport qui s’instaure entre Ancien et Nouveau monde, culture d’origine et culture émergente, dans une perspective diachronique. Il s’agit, dans un premier temps, d’analyser l’apparition des rapports de force entre « ancien » et « nouveau » dans les Amériques, de voir comment du conflit naissent de nouvelles identités nationales. Il s’agit ensuite d’analyser le rétablissement éventuel de l’équilibrage entre Ancien et Nouveau, à partir du 19e siècle, sous forme d’influences mutuelles, avant d’examiner la nouvelle répartition des forces et des interactions dans la période contemporaine.
Le troisième examine la sociabilité en Grande-Bretagne et en France sous l’angle des tensions et des rapports de force, en s’interrogeant sur la manière dont la sociabilité peut résister aux rapports de force, si elle n’est pas elle-même porteuse de ces rapports, ou si les rapports de force lui sont extérieurs. La recherche, interdisciplinaire, se déploie à travers différentes pistes : querelles littéraires et politiques, dialectique de la domination et de la soumission dans les rapports hommes-femmes, échanges binationaux en période de crise ou de guerre, luttes d’influences, conflits de classes.