Réponse au président de l'UBO

Le
MAIL
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Cher Monsieur le Président,
 
Nous vous remercions pour votre message du 14 février où vous expliquez pourquoi vous avez pris la décision de faire intervenir, le vendredi 10 février au matin, les forces de l'ordre pour évacuer la faculté de Lettres et Sciences Humaines. Votre message nous permet de comprendre votre point de vue, vos craintes, les risques que vous envisagiez, ainsi que certaines de vos motivations.
 
Nous nous questionnons cependant : il nous semble que, dans le message que vous nous adressez, certains faits sont discutables et relèvent de l'interprétation personnelle, plus que de l'information. Nous prendrons ici quelques exemples :
 
- Vous indiquez avoir désiré transformer le blocage des étudiant-es en occupation, en mettant à disposition par exemple un amphithéâtre. Certaines personnes argueront que l'occupation des étudiant-es était ouverte à tous et toutes, qu'il était possible d'aller à leurs assemblées générales et qu'iels avaient organisé un temps de formation ouvert sur la réforme des retraites ; que c'est la fermeture administrative de l'UFR qui représentait un blocage, accompagnée de l'incitation à télétravailler, empêchant ainsi les espaces de débat.
 
- Vous indiquez avoir décidé de faire intervenir les forces de l'ordre "par respect pour la grande majorité des étudiants et personnels désireux de reprendre leurs activités". Il est possible en effet que le blocage ne faisait pas l'unanimité dans l'avis des personnes. Il aurait été intéressant de le leur demander. Cependant, assurer que ne pas soutenir l'action des étudiant·es justifie l'intervention des forces de l'ordre nous semble bancal : cela signifierait que la majorité des étudiant·es et personnel·les de l'université sont favorables à l'usage de la force. Cela nous étonne. Encore une fois il nous aurait semblé pertinent de le leur demander.
 
- Vous indiquez que les risques liés à la manifestation de samedi se sont avérés réels... certaines personnes penseront que ce n'est qu'une conséquence de votre propre décision d'évacuation. Nous rappellerons par ailleurs qu'il est usuel, après une manifestation, d'avoir une assemblée générale à Segalen. La présence de 300 personnes sur le parvis n'était donc en rien une menace. Nous nous rappelons y avoir vu des jeunes et des moins jeunes, mais aussi des collégien·nes qui étaient content·s de découvrir à quoi pouvait ressembler une assemblée générale, ou encore un bébé qui faisait quelques pas branlants au moment où les forces de police sont arrivées.
 
- Vous indiquez ne pas avoir eu pour objectif de briser le mouvement étudiant et la mobilisation contre la réforme des retraites. D'autres penseront qu'en évacuant les étudiant·es juste la veille de la manifestation, les obligeant à laisser derrière elle et eux ce qu'iels avaient construit pour cette mobilisation, vous avez fait exactement l'inverse.
 
Ces exemples pour indiquer en quelle mesure votre message relève de votre vécu, de votre interprétation, de votre vision des faits.
 
Le bulletin des services de l'UBO, sorti également ce 14 février, rappelle la documentation présentant l'usage des listes de diffusion. On pourra ainsi noter que la liste Officielle est le "canal officiel de diffusion de l'information". Votre témoignage - certaines personnes parleront peut-être de propagande - n'est en rien de l'information ; il est de l'ordre de l'opinion, de l'avis, du point de vue. Comme nous l'avons évoqué au début de ce message, votre témoignage est important pour comprendre les décisions que vous avez prises. En tant que témoignage il ne semble pourtant pas plus important que le témoignage des autres personnes impliquées.
 
Nous nous inquiétons donc de l'inégalité dans les moyens. En communiquant votre vision des choses sur la liste Officielle, vous jouissez d'un moyen de communication que nous ne pouvons avoir, ni nous, ni les étudiant·es, ni même le directeur de l'UFR qui était en désaccord avec votre décision. En usant des mêmes moyens que le gouvernement qui a envoyé un email individuel à tous les personnels de l'université pour défendre son projet des retraites, là encore projet discutable dont les raisons sont fortement questionnées, vous optez pour une approche dogmatique et non démocratique. Cela nous inquiète. Nous aimons croire en la possibilité d'une université basée sur le dialogue, le partage, le collectif, et l'égalité entre les personnes.
 
Monsieur le Président, de nombreux pouvoirs vous sont conférés. En découlent de nombreuses responsabilités. L'une d'entre elles, et peut-être la plus importante, est de ne pas abuser de ces-dits pouvoirs. Mais peut-être est-ce là le fond du problème : donner ainsi autant de pouvoir à une simple personne.
 
Bien cordialement,
 
SUD éducation