Joë Bousquet : correspondances amoureuses Espace d'identité et d'altérité

Le
Brest, CECJI
Joë Bousquet

La vie de Joë Bousquet (1897-1950) connut un profond bouleversement à la suite de la blessure reçue le 27 mai 1918. Cette terrible blessure le condamna à la paralysie et semblait le vouer à la mort sociale et à une totale solitude. Or, après les étapes de la révolte, du désespoir, de la résignation, il sut, par une sorte de renversement prodigieux, transformer son impuissance en force créatrice. Sa chambre de Carcassonne devint un lieu de rayonnement intellectuel et esthétique.

C’est cette démarche de résilience et d’«Alchimie de la douleur» que l’ouvrage de Zhi Bie permet de suivre à travers l’étude de quatre correspondances amoureuses : les Lettres à Marthe (1919-1937), les Lettres à Ginette (1929-1950), les Lettres à Poisson d'or (1937-1949), les Lettres à une jeune fille (1946-1949).

Ces oeuvres constituent un espace d’identité et d’altérité et permettent de suivre la quête d’une identité vécue comme problématique à travers des relations passionnées où s’unissent tendresse et cruauté, érotisme et mystique, lucidité et idéalisation. Les femmes qu’évoquent ces correspondances seront — chacune à sa façon — médiatrices vers une lucidité et une sagesse supérieures, vers l’accès à un plan de conscience et d’existence jusque-là inconnu.

Cette étude présente un intérêt littéraire et historique : Joë Bousquet fut contemporain et témoin des deux guerres mondiales du xxe siècle dont les échos se font entendre dans plusieurs lettres. Elle constitue enfin une réflexion sur le langage car, si Bousquet fut un compagnon de route des surréalistes sans participer explicitement à leur aventure, il mène, à l’écart mais aussi à l’écoute des tendances esthétiques de son siècle, la recherche d’une prose poétique très originale dans la filiation de Rimbaud. Il veut «trouver une langue» et les réflexions qu’il développe dans ses lettres permettent de saisir les opérations profondes et les finalités de la poésie.

Cet ouvrage permet de découvrir une conception très haute de la poésie et un art de vivre qui assume et transcende l’épreuve.

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Zhi Bie est docteure de l’Université de Bretagne Occidentale au CECJI (EA7289).

Elle travaille actuellement à l’Université Sun-Yat-Sen (Chine) et s’intéresse à la poésie des xi*e et XXe siècles, au rapport entre la poésie et la spiritualité.